ANIAGLAGLA 09--2017 1ère semaine - Le Monstre



Après cette mise en bouche et en jambes hier à la Verna pour sauver la journée pourrie par la météo, Paul, Annette, Frits et moi nous revoici ce dimanche 9 septembre 2017 au matin au chalet de l'Arsip sur le Bracas (PSM) à nous demander s'il est bien opportun de se mettre en route pour le camp d'altitude avec cette pluie qui ne veux pas cesser de tomber. Et ce d'autant que l'isotherme est à peine au-dessus de la station. Tous les bulletins et radars météos sont scrutés heure par heure et semblent annoncer une petite accalmie dans l'après-midi. On essaye d'y croire malgré tous les prévisions de mauvais temps pour les jours à venir.

Vu les conditions, les copains d'Amalgame ont définitivement abandonné le projet initial de visite et photos du Puits "Monstre" de Los NINOS sur Anialarra. Ils décident malgré tout d'aller faire une incursion dans un trou de leur secteur. Elle ne durera guère, le puits d'entrée est en crue, si bien qu'ils reviendront à la case départ en fin de matinée, rincés. Pour eux, le WE est terminé.

Midi : nous passons à table pour diner ou déjeuner c'est selon qu'on est belge ou français... Après quoi, j'aurais bien fais une sieste en attendant de décider quoi que ce soit. Mais qui connait Paul et Frits savent que les mots "attendre" ou "patience" ne font pas partie de leur vocabulaire ! Fini de parler de la pluie et du beau temps. Juste le temps de régler quelques détails pour un éventuel transfert de Papou entre Amalgame et Avalon ;-)) et on prend congé de nos amis. On y va et rien ne nous arrêtera ! Avec dans nos bagages, de quoi aller se réfugier au cas où, quelques jours en amont du système, donc bivouaquer.


Au dessus de Pescamou, plus de pluie. Ben oui, c'est de la neige :-( Une couche de plusieurs bons cm bien lourde. Et ça caille. La montée sur Anialarra s'effectue dans le White Out. Content d'avoir Annette devant qui sans la moindre hésitation trace en direction de la frontière. Le passage de la "touwje" qui fait office de MCpour franchir quelques vires n'est guère commode, elle serait  plus longue que j'aurais été plus à l'aise sac au dos.



Arrivée une heure et demi plus tard sur le lieu de bivouac. Catastrophe, les tentes sont ensevelies ! Le poids de la neige mouillée et probablement une ou l'autre rafale de vent ont eu raison de quelques arceaux, occasionnant quelques balafres dans la toile du double toit ! La poisse....


On ne se laisse pas abattre. Pendant plus d'une heure à se geler les mains, on dégagera  les victimes pour au final, hors des deux, remettre une plus ou moins en état. L'après midi touche à sa fin et sans savoir trop qui se sacrifie dans l'histoire, Paul et Annette reprennent le chemin du chalet pour y passer la nuit, tandis que Frits et moi nous nous réfugions un peu transis sous l'abri pour se refaire une santé; On ne la fera pas longue, juste le temps d'une soupe, un lyoph, un chocomilk et nous descendons les sacs de couchage aux tentes pour pour vite profiter de leur chaleur.





Lundi, J3. Après un TPST (temps passé sous TENTE...) de 12h, il faut bien se décider à sortir (c'est ce que du moins réclament nos vessies !!). La pluie a fait place à un crachin qui pénètre bien. La neige commence à fondre et donc transite en direct par le karst...Sans trop savoir quand arriveront PDB et AVH, nous décidons d'aller au moins voir comment ça se passe dans le Puits Monstre et si par chance il était épargné par la flotte, on commencera le déséquipement de ce formidable -410 dont le seul défaut est de ne pas jonctionner avec le système.

La marche d'approche n'est pas bien longue, et sur celle-ci deux petits ruisselets qui se sont formés ne manquent pas d'attirer notre attention. Des ouvertures connues, marquées (d'une croix) mais qui au vu de l'eau qui y pénètrent cachent surement encore des voies directes vers le collecteur !


Je n'ai pas l'honneur de connaitre la Sima de los NINOS. Pourtant à l'époque, lors des expés ESS, nous campions vraiment à un jet de pierres... Il faut reconnaitre que l'interstice ouvert une douzaine d'année plus tard  est située dans un endroit improbable. Quelle chance, je vais voir ce fameux puits de 258 m ! (voire plus car une verticale de 100 m lui fait immédiatement suite et pourrait être considérer comme étant le même).

Là, à entendre le bruit d'eau dès l'entrée, il va falloir mouiller sa chemise pour le voir. Rien de vraiment alarmant dans le P23 d'entrée et le P8 qui suit; Par contre dans le P23 suivant, là, il faut déjà jouer avec une dév' pour ne pas être complètement dans le jus. Nul doute qu'on dégustera à la remontée. Mais nous avons espoir que l'eau s'en aille à son pied ailleurs et épargne le "Monstre"

Une petite escalade de 4 m permet d'aller prendre pied sur une vire au sommet du Puits. Reste plus qu'à se lancer dans les 258 m de la verticale rééquipée cet été.

Une fois plus bas, force est de se rendre à l'évidence, toute la flotte débarque bien dans le puits. Les premières longueurs sont épargnées mais au bout de quelques fractios, plus moyen d'éviter la pluie. Et vous savez comme moi qu'à la descente, ça va toujours.... et on change d'avis à la remontée...


Je rejoins Frits sur une margelle vers -200 (c'est fou ce qu'il descend vite.... jamais vu un gars aussi rapide dans ses manœuvres, pourtant je suis rodé et je ne glande pas !). Il m'attend et me demande ce que j'en pense ? En fait, dans son dos, d'une cheminée parallèle tombent au minimum 3-4 l/sec d'eau en plus qui filent droit dans la goulotte où nous sommes sensés descendre. STOP ! Avec peut-être en plus un rayon de soleil sur la neige en surface qui pourrait empirer encore la situation, il vaut mieux en rester là... Remontée en essayant d'apprécier les belles dimensions de la bête ! Le P23 flotté l'est encore plus qu'à la descente... Sage décision d'avoir rebrousser chemin.

"Grand-Galop" à l'entrée de Regalo

Dehors, il fait plus lumineux et enfin sec. L'après midi est à peine entamée, on se dit qu'il serait intéressant d'aller vite voir comment se comporte le puits de l'Adrénaline de la Sima Regalo toute proche. Je découvre aussi cette nouvelle cavité ouverte en septembre dernier, à peine revue cet été et avec toujours le même arrêt sur rien vers -140m et donc objectif principal des jours à venir. L'entrée en pente ébouleuse mérite encore une peu d'attention malgré les aménagements effectués avant l'étroiture. Derrière, un petit R5 donne sur une bonne margelle bien nettoyée, sommet du P130 en question. Déjà ici, un bon gros filet d'eau suit la même trajectoire que la corde. Plus bas, un fractio permet de s'en écarter. Frits va voir mais au bout de 50 m juge inutile d'aller plus bas.




La journée n'est pas finie pour autant. Pourquoi rentrer au camp alors que quelques timides rayon de soleil essayent de percer? Nous décidons de basculer sur les flancs d'Ukerdi pour fouiller un peu au pif. C'est ainsi qu'on retrouvera quelques phénomènes marqués (mais pas nécessairement descendus). Parmi eux, l'AN66, soit disant terminé (X), qui mériterait d'être revu nous semble-t-il. Nous repérons aussi par hasard une belle entrée de gouffre invisible si on n'a pas le nez dessus ou le bon angle de vue pour l'apercevoir. Pas de marquage...

Inconnu au bataillon

AN 66 - P30 arrêt sur étroiture à l'époque, non pointé



Vue partielle sur les km2 d'Ukerdi
Et quand on pense qu'on n'est seulement en bordure du secteur d'Ukerdi qui s'étend à perte de vue, on se dit qu'il y a de quoi occuper encore des générations. Assez pour aujourd'hui, retour au camp où Poleke en Anneke ont ramené et monté une nouvelle tente.

Nous passons une seconde soirée dans la grotte-abri, à faire sécher nos sous-combis et combis en mettant un peak-on en fonction. Ci -dessous Petit-Trot et Grand-Galop



Séchoir improvisé mais efficace
Mardi J4 : Lever dans la poisse. Les prévisions météo n'arrêtent pas de changer. Impossible de se faire un programme à plus d'un jour. A moins d'écouter Dago qui par mail nous fait remarquer qu'il serait peut-être plus sage de ne pas se battre contre les éléments et de replier tout ;-)

Pour l'heure,  nous laissons le plan b (3 jours à Nostradamus) de coté pour miser sur l'amélioration temporaire en cours et nous décidons de replonger dans le Monstre pour en finir avec lui.


Paul et Annette enfilent leur vénérables "texair" et sont donc les volontaires désignés pour attaquer le déséquipement du fond, portion la plus flottée. Frits et moi suivons à une heure et prenons le relais là où nous avions rebroussé chemin hier. Bien que P&A se fassent copieusement arroser, le coup d'eau est passé et en 5 heures A/R, le truc est torché.











Du coup, rentré au camp Frits n'est pas encore fatigué... Et comme nous avons droit enfin à un timide petit rayon de soleil, après une petite collation, je l'accompagne pour une prospection.
L'idée est d'aller au-dessus du terminus Tintin mais bon ...on se laissera distraire par la multitude de trous et fissures coté Grieta.


Frits en salopette plonge dans tout ce qui s'ouvre, on dirait moi il y a 30 ans ;-). N'empêche, plein de trucs intéressants attire notre attention. entre autre, des choses déjà vues mais qui ont évolué au fil du temps, donc pas sans intérêt. Et notamment cette grosse dépression certainement souvent remplie de neige mais qui aujourd'hui laisse apparaitre au bas de son éboulis pentu une grosse souricière on ne peu plus attirante. Frits en mode surf l'atteint et passe derrière dans un grand volume toujours en pente.  Quand l'éboulis d'entrée, déstabilisé par son passage, commence à se mettre en route comme un tapis roulant... Pas de panique, il y a place derrière et se mettre en dehors du trajet. N'empêche, rien que le bruit est flippant. Pas de marquage à vue mais impossible que ce ne soit pas connu. S'il n'a pas de nom, je propose le GRAND AVALOIR.




Sur ces petites émotions et encore plus convaincus si besoin était qu'il reste du boulot sur Anialarra, retour comme annoncé vers 20 heures pour cette fois enfin souper en terrasse, mais bien emmitouflés.






CR de la deuxième partie de la semaine consacrée à la Sima Regalo à suivre

ANIALARRA Septembre 2017 - Premier épisode (La Verna)



14 heures de route et le budget qui va avec, c'est le prix à payer pour rejoindre le mythique massif de la Pierre-Saint-Martin, haut -lieu de la spéléologie mondiale, celle-ci étant coordonnée par l'ARSIP. 140 km carrés de calcaire sous lesquels sont déjà cartographiés plus de 440 kms de galeries avec des profondeurs pouvant atteindre ou dépasser les -1000m.

C'est là, sur la frontière, coté espagnol..., que l'interclubs belge, regroupé autour du noyau dur qu'est le SC Avalon, sévit sur le le secteur d'Anialarra depuis maintenant 20 ans, après que l'Equipe Spéléo St-Nicolas et d'autres précurseurs bien avant aient initié les explorations de cet incroyable lapiaz. A ce sujet, je ne saurais trop vous recommander de consulter le superbe bulletin ARSIP 18 où Paul De Bie a publié une synthèse remarquable.


En ce début septembre 2017, comme lors de l'édition 2016, c'est avec Frits que je rejoins Paul et Annette pour passer une semaine à poursuivre le boulot réalisé le mois passé, alors que j'étais non loin de là sur le Capéran avec Continent 7.

A notre arrivée le vendredi soir au chalet de l'Arsip sur le Bracas, nous retrouvons sous un ciel bien dégagé quelques "Amalgamins" (Alain B., Papou, Maxou, Régis, Véro, Sébastien) dont le projet est d'aller faire des photos dans le Puits Monstre (P258) de la Sima de los Ninos sur "notre" zone et ensuite le déséquiper.


Pescamou(illé !)
Malheureusement, le ciel se couvrira la nuit pour faire place au petit matin à un temps typique de la Pierre. Pas seulement du brouillard mais bien des pluies très soutenues. Bien qu'en son fort intérieur chacun pense qu'il vaudrait mieux ne pas démarrer, il n'est pas encore 9h que nous nous retrouvons tous à Pescamou au départ de la marche d'approche alors qu'il pleut des cordes. Mais au vu des conditions, un éclair de raison finira pas animer quelques esprits : nos décidons d'abandonner. Et de se retrouver au chalet à faire le point autour d'une tasse de café. Pour sauver la journée, Alain nous propose de descendre à la Salle de la Verna pour y faire des photos. Contrairement à Frits, la Verna et ses salles, je connais pour les avoir plusieurs fois visitées. Mais sa proposition de monter visiter la galerie du porche des "Zobstinés" ne peut se refuser !


On se retrouve donc rapidement en tenue devant la cabane Prebende à l'entrée du tunnel où le C.A. souffle toujours. A son débouché dans la salle, sur la plateforme, un dirigeable (l'Aéroplume) accroché à la rambarde attend son pilote qui devrait ce matin faire un vol de test dans l'immense vide souterrain. Dans l'obscurité, nous descendons vers la rivière que nous traversons pour chercher pendant un petit moment les 10 mm de diamètre de la corde qui pend plein pot du plafond au milieu de nul part !



Tandis que Alain, Maxou, Régis et Séba poursuivent leur chemin pour monter à Aranzadi, nous sommes quatre Véro, Papou, Frits et moi à nous tracter un après l'autre sur nos bloqueurs pour avaler en une vingtaine de minutes les 107 mètres qui nous séparent du porche. On a beau avoir l'habitude d'évoluer sur cordes, je reconnais pour ma part trouver la montée impressionnante. Évoluer à la verticale sur un bout de ficelle presque invisible dans le volume de 3.6 millions de m3 de la plus grande salle d'Europe (voir le site de La Verna), qui plus est éclairée dans tous les coins, ça n'a rien d'anodin. Franchement, j'ai regardé à deux fois à bien placer mon matos, j'ai fais gaffe à bien pomper pour éviter l'effet yoyo, à essayer d'accrocher mon regard à quelque chose lorsque ça tournoyait. Tout ça avec le bruit assourdissant de la cascade, la rivière se mettant tout doucement en crue. Difficile aussi dans cet environnement embué de savoir lorsque le copain est en haut. Merci à Papou pour les photos et à Véro pour sa vidéo



Respect en tout cas aux Z'obstinés qui ont réussi à atteindre ce porche (et d'autres d'ailleurs). 200 de MC  à installer pour traverser de part en part la salle en oblique dans un banc de bonne roche. Une escalade d'anthologie tant pour le grimpeur que pour ses assistants.



Le jeu en valait la chandelle puisque c'est une belle galerie horizontale qui se développe là-haut sur une cinquantaine de mètres. Elle est balayée aujourd'hui par un bon courant d'air soufflant, probablement dû à l'actif qui débouche des plafonds de la diaclase pincée tout du long. Au bout, Frits ne peut évidemment s'empêcher de se faufiler au plus loin possible, malgré le filet d'eau et les parois de moonmilch (faut bien baptiser sa nouvelle salopette !). Faut dire que je suis aussi curieux que lui ! Ici, il constate un léger courant d'air aspirant et conclut en disant que si nous étions dans une cavité belge,on reviendrait avec les outils appropriés pour ouvrir le pertuis terminal. Que n'avions-nous emporté ça..., sûr qu'on aurait fait au moins quelques mètres de plus !


Pas tout ça, faut redescendre... Lentement au début (poids de la corde), plus vite sur la fin... et cette fois dans le noir total, drôle d'impression. L'équipe de l'Aéroplume est ressortie de la grotte après un piqué-planté du dirigeable passé malencontreusement sous des pisserolles tombant du plafond... Évidemment, avec la météo exécrable qui sévit à l'extérieur, ça commence à tomber d'un peu partout... Incident sans heurt ni dégât heureusement.

A nouveau sur le plancher des aphaenops... (sont protégés...), je propose à Frits de monter nous aussi à Aranzadi, Pour l'atteindre, il faut varapper sur la paroi au niveau d'une goulotte pour l'instant très flottée, assuré tout du long au bloqueur sur une corde fixe en place (à noter un petit couac d'équipement au niveau d'un bombement où la corde frotte, une gaine pas pratique ne règle guère le problème).
La haut, bien que ce soit une galerie "fossile", il y a de l'ambiance avec l'arrivée d'un gros ruisseau débouchant du méandre Maria Dolores où Amalgame a des espoirs de jonction avec Xendako Ziloa. Frits comme à son habitude scrute les plafonds et autres départs aériens, se demandant si les escalades ont toute été réalisée ? N'y aurait-il pas encore quelque chose à tenter dans l'espoir de passer à un étage supérieur...Peu de chance, c'est l'endroit le plus fouillé de la grotte. N'empêche, la prochaine fois, on prendrait bien du matos et nos couchages pour passer la nuit ici !  ;-).

Nous ne nous aventurons pas très loin car Papou nous fait remarquer qu'avec cette crue, si on tarde trop, retraverser la rivière en bas pourrait devenir problématique. Et de fait, on en aura jusqu'aux genoux pour rejoindre le reste de l'équipe qui décide d'aller encore faire quelques photos en amont. Nous leur emboitons le pas pour ainsi monter à la centrale et ensuite traverser la salle Chevalier et pousser jusqu'à la salle Adélie.Une "rando" qui ne laisse jamais indifférent, surtout avec autant d'eau. Une ambiance que Alain immortalisera à travers quelques photos faites en pause avec balayage de spots.


Prise de vue @lain Bresan. Si j'avais su, j'aurais été me placer tout au bout sur l'éboulis du fond
Retour en surface vers 18h. Semblerait que la pluie ait cessé. On repasse à l'auberge Burguburu pour rendre la clé mais aussi faire vivre le commerce local, entendez par là prendre l'apéro, ce qui nous donne l'occasion de déguster la p'tite dernière de chez Akerbeltz, une blonde dont je n'ai pas retenu l'orthographe exacte mais qui en basque veut dire "foin" (même pas encore reprise sur le site akerbeltz.fr)

Retour au Chalet de l'Arsip où Paul et Annette viennent de rentrer. Profitant de quelques éclaircies dans l'après midi, ils ont en 3 heures de temps été monter les 2 tentes au camp d'altitude. Reste à savoir si nous pourrons aller nous y installer demain ? La météo n'augure rien de bon pour les jours qui viennent....

A suivre dans l'épisode 2 !